Il y a, tout là-bas, comme une musique. Elle carillonne dans les lambeaux de la nuit. Et les notes s’égrainent à l’infini, tournant dans une complainte, au firmament de ce cirque. Elle tourbillonne dans les lumières de la ville, au pas mesuré des chevaux, sans vergogne on arrache un manteau, déshabillant les plus dociles de leurs atours pour mettre à jour leurs émois les plus vils. Montez mademoiselle et prenez place dans le troupeau, virevoltez un instant vers le son versatile de ce timbre envoûtant qui masque le démon. Écoutez la chanson en suivant le sillon, vautrez-vous dans un fauteuil profond, caressant le vinyle d’une main que l’on tient et qu’on lâchera bientôt pour une nouvelle idylle, un autre rendez-vous que l’on a pris dans votre dos. Do, si, la facette que l’on montre aussitôt, dans la courbe pourtant se discerne le profil mais vous fermez les yeux, emballées par les cieux aux lanternes chatoyantes où miroitent attrayantes les promesses de retours. Mais le tour touche à sa fin, descendez de vous-même, à moins que l’on aime vous regardez tourner. Enfin vous comprenez que la boucle est bouclée et que rien ni personne ne viendra vous cherchez. Alentours les rires fusent, on s’amuse sans vous mais au fond vous gardez les éclats de la muse que vous étiez avant. Avancez, et sautez en marche, il le faut ! Entendez-vous les tonalités de la fugue ? Le manège qui vous subjugue ne s’arrêtera jamais, vos bribes d’amour se conjuguent à l’imparfait, mais il reste dans le lointain, en vos larmes impudiques, tout là-bas sur le chemin… Comme une musique.
Muriel Roland Darcourt
Fragments - Le séduisant manège